A tout seigneur tout honneur… le Pin de Salzmann !
Petite détermination :
• aiguilles (feuilles) par groupes de deux
• aiguilles assez longues : plus de 8 cm (groupe de Pinus nigra)
• aiguilles souples, non ou peu piquantes
• aiguilles droites, fines (1 mm), non piquantes ; jeunes rameaux orangés, luisants ; cônes moyens brun clair, luisants, à mamelons proches du pédoncule ; tronc argenté, brillant ; arbre médiocre, parce que cantonné en de mauvaises conditions ;
• à la limite des étages méditerranéen et collinéen : Cévennes, Pyrénées, Espagne
• Pin des Cévennes = Pin de SalzmannPinus Salzmannii Dunal (= P. nigra ssp. salzmannii (Dunal) Franco
« Le Pin de Salzmann ou des Cévennes, Pinus nigra ssp. salzmannii (dédié à P. Salzmann, 1751-1851), médecin-naturaliste saxon ayant résidé à Montpellier, est considéré comme une sous-espèce endémique des Cévennes calcaires (de l’Hérault, du Gard et de l’Ardèche) et des Pyrénées ; il forme une belle et célèbre forêt à St-Guilhem-le-Désert. Peu élevé, 6 à 10 m, et tortueux, il étale ses branches horizontalement et sa couronne est bien souvent tabulaire. Les plaques de l’écorce sont d’un gris argenté. Les feuilles (aiguilles), de 12 à 15 cm, dressées le long des rameaux sont géminées dans une gaine persistante. Les cônes sont petits, de 4 à 8 cm, ovales ou coniques, habituellement un peu courbés ; les écailles ont l’écusson bombé et caréné ; les graines, de 6 mm, sont accompagnées d’une aile trois à quatre fois plus longues, lancéolée et arrondie au sommet. Très sensible à l’action du feu. »
(H. Harrant et D. Jarry, Guide du naturaliste dans le Midi de la France, tome II, 1973)
Première approche
St-Guilhem-le-Désert, pour nous, ce n’est pas la porte d’à côté : Neuchâtel – Genève – Vallée du Rhône – Orange - Nìmes – Montpellier (sortie ouest, prendre avec assiduité la direction Millau : 9 ronds-points !) – Gignac – Aniane – St-Guilhem-le-Désert… 700 km environ, ouf ! Mais cela en vaut la peine. Notre premier contact avec un exemplaire de cette « célèbre forêt de Pin de Salzmann » se situe au-dessus de St-Guilhem-le-Désert. A pied, vous quittez le parc municipal (altitude 100 m) de cette superbe cité médiévale et, par un chemin montant fort agréable, vous arrivez aux Fenestrelles (300 m), avec un magnifique point de vue sur le Cirque de l’Infernet. Aux Fenestrelles, vous êtes à pied d’œuvre. Je me souviens de la sensation émotionnelle éprouvée à ce premier contact, une sensation que je comparerais à la vue d’une œuvre d’art, d’un monument célèbre. C’est l’émotion de tout botaniste découvrant pour la première fois un individu d’association. Rien de tel qu’un relevé botanique pour se mettre l’eau à la bouche !
Forêt de Pin de Salzmann (Querco-Buxetum salzmannietosum)
(un individu d’association)
Relevé :
Benoît Garrone, Uni de Montpellier
Station :
Les Fenestrelles (au-dessus et à l’ouest de St-Guilhem-le-Désert ; il faut compter deux heures de marche de St-Guilhem-le-Désert, 100 m d’altitude, aux Fenestrelles ; en botanisant… 4 h !)
Altitude :
310 m (peut-être l’altitude la plus basse dans la région pour ce type de forêt !)
Aire :
4 ares
Pente :
20o
Exposition :
nord
Sol :
socle calcaire dolomitique ; fane composée essentiellement d’aiguilles de pins
Date :
08.07.1980
Arbres (4-5 m de haut ; 2 espèces) Recouvrement : 70%
Cotation (voir échelle de Braun-Blanquet ci-dessous)
Pin de Salzmann
Pinus salzmannii
4
Chêne vert
Quercus ilex
+
Arbustes (13 espèces) Recouvrement : 95%
Buis*
Buxus sempervirens C
2
C : caractéristique du Querco-Buxetum (Buxaie à Chênes)
Cytise à feuilles sessiles
Cytisus sessilifolius C
+
Chèvrefeuille d’Etrurie*
Lonicera etrusca C
(+)
Chèvrefeuille de Mahon
Lonicera implexa
(+)
Bruyère multiflore
Erica multiflora
3
Romarin officinal*
Rosmarinus officinalis
3
Amélanchier*
Amelanchier ovalis
1
Filaria moyen
Phillyrea media
1
Filaria à feuilles étroites
Phillyrea angustifolia
+
Genévrier de Phénicie
Juniperus phoenicea
(1)
Genévrier cade
Juniperus oxycedrus
+
Prunier Mahaleb*
Prunus mahaleb
+
Nerprun alaterne
Rhamnus alaternus
+
Strate herbacée (17 espèces) Recouvrement : 5%
Germandrée dorée
Teucrium aureum
+
Thym vulgaire*
Thymus vulgaris
+
Immortelle stoechas
Helichrysum stoechas
+
Epervière des murs*
Hieracium murorum
+
Fétuque ovine*
Festuca ovina
+
Hélianthème blanchâtre*
Helianthemum canum
+
Genêt poilu*
Genista pilosa
+
Pistachier térébinthe
Pistacia terebinthus
+
Aspérule à l’esquinancie*
Asperula cinanchica
+
Chrysanthèmeà feuilles de graminées
Chrysanthemum
graminifolium
+
Fumana fausse bruyère*
Fumana ericoides
+
Euphorbe serretée
Euphorbia serrata
+
Coris de Montpellier
Coris mospeliensis
+
Bugrane très grêle
Ononis minutissima
+
Lavande à larges feuilles
Lavandula latifolia
+
Plantain toujours vert*
Plantago cynops
+
Anthyllide à fleurs rouges
Anthyllis vulneraria
var. rubriflora (A. dillenii)
On ne peut parler de phytosociologie sans avoir une pensée reconnaissante envers Josias Braun, né à Coire en 1884.
« Le développement de la géobotanique européenne et même mondiale au XXe siècle est dans une partie considérable le résultat de l’activité tenace de cet homme extraordinaire ».
C’est un autodidacte de la botanique. Privé de titres universitaires, handicap majeur en Suisse, il s’exila en France, à Montpellier dans l’Hérault. Là il rencontre Gabrielle Blanquet qui deviendra son épouse. Dès ce moment il signera tous ses travaux « Josias Braun-Blanquet ».
En 1915, sous l’égide des professeurs Flahault et Pavillard, il présente une thèse de doctorat sur la végétation des Cévennes méridionales. En 1930, il fonde la Station internationale de la géobotanique méditerranéenne et alpine de Montpellier (SIGMA). En 1948 il édite la revue Vegetatio qui deviendra la tribune internationale de la géobotanique.
Il est l’auteur de nombreux travaux et fut honoré de cinq doctorats honoris causa, reçut la médaille d’or de la Société linnéenne de Londres en 1974. Et encore : Chevalier de la Légion d’honneur !
Echelle de Braun-Blanquet
J. Braun-Blanquet a eu l’idée d’introduire une échelle des valeurs - à double chiffre (le premier représentant l’abondance-dominance, le second la sociabilité ou mieux la fidélité) - traduisant l’image d’un peuplement végétal quant à l’importance des espèces les unes par rapport aux autres en fonction de l’aire considérée.
Abondance-dominance (à 7 niveaux)
5
plus des ¾ de la surface totale
4
½ - ¾
-
3
¼ - ½
-
2
1/20 - ¼
-
1
peu abondant (moins de 1/20) de la surface totale
+
peu
r
espèce rare (dans l’aire considérée)
Sociabilité (ou fidélité)
5
peuplement très dense
4
petites colonies
3
groupes étendus
2
groupes restreints (touffes)
1
individus isolés
Exemples :
Allium ursinum
3.5
(le 3 indique l’abondance-dominance ; le 5, la sociabilité)
Se « lit » : plante occupant presque la moitié de l’aire (3), et d’une manière très dense (5)
Picea abies
5.1
Se lit « lit » : plante occupant presque toute la surface avec des pieds isolés (par exemple dans une monoculture d’Epicéas)
Cette double cotation a été utilisée par de nombreux botanistes dans leurs relevés botaniques ;
Citons, entre autres : Jos. Braun-Blanquet, Max Moor, Jean-Louis Richard, etc. Toutes leurs listes de plantes (relevés botaniques) sont écrites avec la double cotation. Il faut avouer que ce type d’écriture donne une idée très imagée des stations étudiées.
Cependant, les botanistes modernes ont supprimé le second chiffre (la sociabilité). La rédaction des listes de plantes en est simplifiée.
Actuellement :
Allium ursinum
3
(la sociabilité a été supprimée)
Picea abies
5
Il est à remarquer également que la cotation phytosociologique dépend uniquement de la personnalité des botanistes concernés. Mais dans l’ensemble, chacun est d’accord avec la cotation proposée. A lire les listes de Braun-Blanquet, à étudier celles de Max Moor, ou encore Jean-Louis Richard, eh bien, on est très vite plongé dans l’ambiance du terrain !
Saint-Guilhem-le-Désert
En deux mots : allez-y !
Remerciements
Jean-Louis Richard, 1921-2009, Uni Neuchâtel ; Benoît Garrone, Uni Montpellier ; Marie-Rose Krebs, Bienne ; Denise Primault, Bienne ; Jean Frei, Genève ; André Rossel, Tramelan ; Elsi Wepf, Dietwil AG
Ou :
Hostellerie Saint-Benoit (Logis de France) / A 5 minutes en voiture de St-Guilhem-le-D.
Route de Saint-Guilhem
34150 Aniane F
Courriel : hostellerie.st-benoit@wanadoo.fr